L’éco-anxiété, cette détresse psychologique face aux crises environnementales, n’est plus cantonnée à la sphère privée. Elle s’infiltre désormais dans les open spaces, les réunions stratégiques et les bilans de compétences. Selon une étude Imagreen – Kantar, 4 salariés sur 10 ressentent un décalage entre leurs convictions écologiques et les pratiques de leur entreprise.
Ce malaise, s’il n’est pas pris en compte, peut engendrer désengagement, turnover, voire burn-out. Mais bien accompagnée, l’éco-anxiété peut devenir un puissant levier de transformation organisationnelle.
Qu’est-ce que l’éco-anxiété ?
L’éco-anxiété, ou solastalgie, désigne une forme d’angoisse liée à la dégradation de l’environnement et au sentiment d’impuissance face aux crises climatiques. Ce terme, apparu dans les années 1990, a gagné en visibilité ces dernières années, notamment chez les jeunes adultes, mais il touche désormais un public plus large, y compris les professionnels.
Cette anxiété se manifeste par des émotions telles que la peur, la tristesse, la colère ou la culpabilité, souvent alimentées par une surinformation et une conscience accrue des enjeux environnementaux.
L’éco-anxiété, bien qu’issue de préoccupations environnementales, s’immisce de plus en plus dans le quotidien professionnel. Elle ne se limite plus à la sphère privée : elle traverse les open-spaces, influence les décisions de carrière, altère la motivation et redéfinit même les attentes des salariés vis-à-vis de leur employeur.
Symptômes en entreprise : comment se manifeste l’éco-anxiété ?
Sentiment d’incohérence éthique
Nombre de salariés ressentent une dissonance cognitive entre leurs valeurs écologiques personnelles et les pratiques de leur entreprise : gaspillage, manque de transparence RSE, voyages d’affaires fréquents, absence de politiques durables… Ce décalage peut générer :
- Un sentiment de culpabilité (« Je participe à un système que je désapprouve »),
- De la perte de sens dans son travail,
- Parfois un désengagement émotionnel voire un épuisement moral..
Burn-out écologique : un phénomène émergent
Certains collaborateurs investis dans les enjeux environnementaux peuvent aller jusqu’au burn-out militant ou écologique. Cela touche en particulier les salariés engagés dans des rôles à impact (RSE, développement durable, communication responsable), confrontés à :
- Une pression interne et externe constante pour agir vite et efficacement,
- Une sensation d’impuissance face à l’inertie des structures,
- Un isolement, surtout si leur démarche n’est pas partagée par leur hiérarchie.
Impacts sur la motivation et la fidélité des talents
L’éco-anxiété influence également la manière dont les collaborateurs perçoivent leur avenir professionnel :
- Les jeunes générations (notamment les Gen Z et millennials) sont plus enclines à quitter un poste si elles estiment que l’entreprise ne s’engage pas réellement sur les enjeux environnementaux.
- Le recrutement et la fidélisation deviennent plus difficiles pour les entreprises perçues comme « non alignées » avec les préoccupations climatiques.
- L’aspiration à des carrières porteuses de sens se renforce, favorisant les reconversions vers des secteurs à impact positif.
En résumé, l’éco-anxiété au travail se traduit par :
- Une perte de sens : le sentiment que son activité professionnelle contribue à la dégradation de l’environnement.
- Une dissonance cognitive : entre les valeurs personnelles et les objectifs de l’entreprise.
- Un stress chronique : lié à l’impuissance face aux enjeux climatiques.
- Une baisse de motivation : voire un désengagement progressif.

Ces manifestations peuvent impacter la performance individuelle et collective, et fragiliser la cohésion des équipes.
Conséquences pour l’entreprise : un risque sous-estimé
Ignorer l’éco-anxiété, c’est s’exposer à :
- Une augmentation de l’absentéisme : lié au mal-être des collaborateurs.
- Un turnover accru : notamment chez les jeunes générations en quête de sens.
- Une détérioration de la marque employeur : face à des candidats sensibles aux engagements RSE.
- Des tensions internes : entre les collaborateurs engagés et une direction perçue comme inerte.
À long terme, ces facteurs peuvent nuire à la performance globale de l’entreprise.
Agir concrètement : des leviers à activer
1. Reconnaître l’éco-anxiété comme un sujet légitime
Il est essentiel de créer un espace de dialogue où les collaborateurs peuvent exprimer leurs préoccupations environnementales sans crainte de jugement.
2. Former les managers à l’écoute active et à la gestion des émotions
Les managers jouent un rôle clé dans l’accompagnement des équipes. Des formations spécifiques peuvent les aider à détecter les signaux faibles et à adopter une posture bienveillante.
3. Intégrer des actions RSE concrètes et participatives
Impliquer les collaborateurs dans des projets écoresponsables renforce leur sentiment d’utilité et d’appartenance. Cela peut passer par la mise en place de groupes de travail, de défis internes ou de partenariats avec des associations locales.
4. Proposer des formations adaptées
Des formations ciblées peuvent aider les collaborateurs à mieux gérer leur éco-anxiété et à s’engager de manière constructive. Par exemple :
- Formation Gestion du Stress : pour apprendre à canaliser ses émotions et retrouver un équilibre.
- Parcours Intelligence Émotionnelle : pour développer une meilleure compréhension de soi et des autres.
- Formation Résilience et lâcher prise : pour acquérir des outils de résilience face aux incertitudes.
Vers une entreprise plus résiliente et engagée
L’éco-anxiété, loin d’être une faiblesse, peut devenir un catalyseur de changement. En la prenant en compte, les entreprises peuvent :
- Renforcer l’engagement des collaborateurs : en alignant les valeurs individuelles et collectives.
- Stimuler l’innovation : en encourageant des initiatives durables.
- Améliorer la performance globale : en créant un environnement de travail sain et motivant.
Il est temps de considérer l’éco-anxiété non comme une menace, mais comme une opportunité de repenser nos modes de fonctionnement et de construire ensemble un avenir plus durable.